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Confrontée à la pression foncière et à l’orpaillage menaçant ses bois sacrés, la population du village de Kalwaka, dans la région du Centre-Ouest, s’est constituée en association pour mieux défendre son patrimoine naturel et culturel. Cette initiative endogène force l’admiration, tant au niveau local qu’international. Immersion dans ce milieu rural où le combat pour la préservation des traditions ancestrales est indissociable de la lutte pour la protection de la biodiversité, de l’environnement.
Kalwaka, un village atypique ! Cette bourgade de 2800 âmes, située dans la commune rurale de Soaw, dans la région du Centre-Ouest, à 90 km de Ouagadougou, reste attachée à ses collines, puits et bois sacrés. Il en compte plus d’une quinzaine sous la protection des traditions. Flanquée de grosses pierres sauvages, clairsemée d’épineux de la savane nord-soudanienne, la colline sacrée « Selogue-Tanga » constitue par exemple un symbole du canton de Konkistenga, composé des communes rurales de Imassogo, Pella, Soaw.
« Depuis longtemps, en cas de sécheresse, des envoyés du chef du canton viennent faire des sacrifices d’âne et de poulet au niveau de cette colline. Le plus souvent, la pluie les bat le même jour, avant qu’ils ne regagnent le village », témoigne le responsable du site, Yamba Issaka Kaboré, en cette matinée caniculaire de mars 2021. La colline protège le village, ajoute-t-il. L’accès à son sommet est interdit aux étrangers sans autorisation. On ne doit pas y couper du bois, y aller les lundis et les vendredis correspondant aux jours où un gros serpent « inoffensif » portant des cornes avec une gueule pleine de flammes sort de la grotte au sommet de la colline, aux environs de 9 heures, raconte M. Kaboré. Quant au bois sacré « Wagdakalsé », lui, offre un contraste saisissant ! Un ilot de forêt d’environ 1,77ha dans un univers savanicole. Arbustes, arbres, plantes rampantes s’y enserrent pour former un condensé végétatif qui tranche avec le paysage environnant. Au bord du sentier longeant ce biotope singulier, une murette peinte en blanc porte le nom du site et des symboles indiquant les actions interdites sur les lieux. Interdictions de faire la chasse, couper le bois vert, mettre le feu, creuser la terre, déféquer.
Sites d’intérêt « incalculable »
D’un site à un autre, les fonctions sociales et les rites y afférents varient. A « Tansoab-Tanga », lorsqu’un malheur quelconque frappe la région, les divinités de la colline sont appelées à la rescousse pour sauver Kalwaka du danger. « L’intérêt de ces aires sacrées pour le village est incalculable. Avant, lorsque surviennent des épidémies de rougeole, de varicelle à Koudougou, Nanoro, il suffisait que les notables fassent un sacrifice d’une chèvre et d’une poule noires à la colline et le village est épargné de la crise sanitaire », confie le chef coutumier, le Tansoaba. Ces écosystèmes sacrés font partie intégrante de l’histoire et de l’identité culturelle du village. « Quand nos ancêtres se sont installés ici, ils se sont confiés à ces sites pour leur protection et le développement du village », raconte le Tansoaba. Aujourd’hui plus qu’hier, la population kalwakalaise défend ce patrimoine communautaire, contre les tentatives d’atteinte, notamment de la part des chercheurs d’or. « Il est possible que les orpailleurs exploitent la colline. Mais ils doivent préalablement enjamber nos corps sans vie avant d’y arriver. Je suis musulman et Imam du village, je ne fais pas de sacrifices sur la colline du fait de ma foi religieuse, mais je ne tolèrerai jamais que quiconque détruise ces lieux sacrés. Ils constituent notre bien commun », fulmine Yamba Issaka Kaboré. Lire la suite https://www.sidwaya.info/blog/2021/06/02/conservation-des-bois-sacres-kalwaka-lexemple-dune-conscience-communautaire/?fbclid=IwAR1BK5BaE9fCQ3ig7zVBS0AT_fw8ng1gp5TXYuall0F3Hzapdm3QuV8v6fQ